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lundi 16 janvier 2012

No pasaré...


J'ai découvert il y a quelques jours, à mon insu, que Wikipédia censurait farouchement certains mots, et notamment le mot « Etats-Uniens ». J'ai découvert aussi, non sans une certaine tendresse, qu'un certain nombre de contributeurs enragés passent leurs journées à rechercher ces occurrences dans les articles pour les éradiquer. Des retraités ayant fait l'Indochine peut-être ?


Après être allé jeter un coup d'oeil sur le profil de l'un d'eux (celui qui m'a débusqué), un certain J.-J. G., j'ai compris :

« J'éprouve une très forte antipathie envers l'antiaméricanisme pernicieux, seule forme de racisme autorisée, étant relativement américanophile au plan culturel, ce qui ne veut pas dire pro-américain au sens politique du terme. L'un de mes chevaux de bataille a longtemps été l'élimination, l'extermination, l'équarrissage pur et simple du proto-néologisme « Etats-unien », répandu par des médias et des tristes sires, et que certains s'obstinent, de bonne foi ou non, à utiliser dans des articles de Wikipedia. »


J'ai souri. Un coup d'oeil à droite de sa page de présentation :

« J'exècre l'Anarchie  Non à l'Anarchie comme à l'Anarchisme. Anarchie = loi du plus fort. Même dans le village des Schtroumpfs, ça ne fonctionnerait pas : ils ont bien le Schtroumpf grognon ! »


Un peu plus bas dans le texte : 

« Je me suis ramassé deux blocages à cause de cette stupidité [son obsession de l'éradication du terme Etats-Unien] : désagrément dont je me fais une sorte de blessure de guerre, attendu que le débat auquel j'ai contribué a abouti à une prise de décision. Tout en déplorant qu'on en soit arrivé là, je m'en félicite, attendu qu'elle a eu pour conséquence de limiter sévèrement l'usage de ce terme inepte. »


Je commençais à découvrir la face cachée de Wikipédia : Simplet est aux commandes. Il est de droite. Il a beaucoup de temps à perdre. Il est très en colère. Et la loi, c'est lui.


Etazuquoi ?!

Je ne suis pas un farouche partisan du mot « États-Unien » (que j'emploie à l'occasion, quand il me permet d'être plus précis), mais tout phénomène de censure d'un mot courant éveille ma méfiance (amusée dans ce cas). Oui, parce que j'ai tendance à croire, comme Gandhi, que « tout est politique ». Alors toute mésaventure a ses bons côtés. Et dans ce cas, la situation, d'un point de vue pratique, était assez drôle. Parce qu'il y a quelque chose d'amusant à voir débouler les censeurs. Essayez pour voir : prenez un article dans Wikipédia, tapez Etats-Uniens à la place d’Américain dans le texte, de façon totalement anodine et neutre, modifiez l'article, cliquez, et attendez un peu. Un déluge de fer et de feu s'abattra rapidement sur vous : mon ami d'un soir viendra (toujours entre 8 et 9 heures du matin), il vous recalera, et il remettra en place ce qui existait avant votre passage d'abominable bolchévik antiaméricain pro-Besancenot, en vous signifiant fermement qu'une règle a été mise en place afin d'interdire ce mot odieux.


Je ne sais pas vous, mais moi, tout ça, je ne m'y attendais pas. J'avais juste mis le terme « Etats-Uniens » dans mon article sur la Diaspora portugaise parce qu'il était plus précis qu'Américain dans le cadre (international) du continent Américain dont je parlais. Quand j'ai vu qu'on m'avait censuré, je me suis dit : « Etat-Zut alors !... »


Interloqué par ce parti-pris, j'ai choisi d'aller lire la discussion qui avait précédé l'étonnante motion de censure. Oui parce que Wikipédia a vraiment imposé une « prise de décision », un genre de loi interne interdisant l'emploi d'un mot figurant dans les dictionnaires. C'était affligeant de bêtise par endroits et long au possible.


Je suis ensuite allé lire l'article Dénomination des Etats-Unis d'Amérique et de leurs habitants. J'ai eu la sensation d'y lire une vague tentative de réflexion frôlant surtout la mauvaise foi, et j'ai donc décidé de corriger un certain nombre de choses, citations précises, textes et références à l'appui (fallait pas déconner, fallait faire ça bien, fallait que ce soit beau).


Suit ma contribution, également censurée pour des questions de « manque de neutralité » par un de ces chevaliers de la Toison D'Or version 2.0.


Je me suis permis de la modifier par endroits pour la rendre plus fun. J'ai retiré tous les passages qui n'étaient pas de moi. Les citations et les références manquent. Je ne sais pas comment les insérer dans ce blog. Mais je m'engage à toutes les envoyer à qui veut par mail sous format Pdf. Je ne fais de toutes façons de renvois qu'à des termes usuels ou à des évènements historiques universellement reconnus. Vous pouvez tout vérifier (même sur Wikipédia, je leur fais de la pub, allez !) :


First Word War : « Etats-Uniens » Vs « Américains »

Alors d'abord, est-ce que le mot existe ? Eh bien oui, il existe. Ce n'est donc pas un néologisme dans le sens où tous ses détracteurs l'entendent, c'est-à-dire une faute de français. Le terme « États-Unien » est aujourd'hui défini dans la majorité des grands dictionnaires de la langue française (Robert, Larousse), sans connotation péjorative ou idéologique. Il se rapporte sans équivoque aux États-Unis d'Amérique, et est toujours mentionné de façon neutre. Il semble donc bien que ce soit le contexte d'utilisation qui induise la charge idéologique ou péjorative, et non le mot lui-même.


 L'ambiguïté supposée du terme « États-Unien » 

Les détracteurs du terme « États-Unien » expliquent qu'une ambiguïté existe (je les cite) : « puisque d'autres pays du continent américain sont également formés de l'union de plusieurs États, comme les États unis mexicains (Estados Unidos Mexicanos), ou la République des États unis du Brésil (República dos estados unidos de Brasil, nom porté par le pays jusqu'en 1968) ». Ils vont jusqu'à racler les fonds de tiroirs de l'histoire pour étayer leurs propos, ajoutant qu'il a aussi brièvement existé (1790) des États belgiques unis (ou États unis belgiques). Ils auraient pu ajouter les Etats-Unis de Colombie (1863) que ça n'aurait pas changé grand chose.


En réalité, cette ambiguïté supposée par eux est un leurre, puisque les Etats-Unis d'Amérique constituent la seule fédération à ne pas englober tous les Etats de l'espace désigné par leur gentilé : toute l'Amérique n'est pas incluse dans les États-Unis d'Amérique, tandis que tout le Mexique est inclus dans les Etats-Unis du Mexique, tout le Brésil dans les États-Unis du Brésil, etc. C'est d'ailleurs ce qui explique que l'expression « États-Unis », dans sa forme courte, renvoie exclusivement aux seuls Etats-Unis d'Amérique. Et que la page Wikipédia qui leur est consacrée porte ce titre.


À cela, il faut ajouter que du point de vue de l'usage, le terme « États-Unien » a toujours été utilisé pour désigner les habitants des États-Unis d'Amérique. En fait, le terme « États-Unien » est, d'un point de vue scientifique et sémantique, beaucoup plus précis et rigoureux que le terme « Américain », puisqu'il renvoie sans ambiguïté aux seuls citoyens des États-Unis d'Amérique.


Le problème de la neutralité du gentilé « Américain » au regard de l'histoire et du droit des États-Unis

Contrairement à ce que laissent entendre les défenseurs du gentilé
« Américain », l’usage des termes « Américains » et « américain » n'est pas neutre.


Comme je l'ai expliqué plus haut, il n'est pas une généralisation analogue à l’emploi de « Mexicains » et « mexicain » au sujet des « États-Unis mexicains », dans la mesure où la fédération Mexicaine englobe tous les Etats mexicains, tandis que la fédération des États-Unis d'Amérique n'englobe pas tous les Etats d'Amérique. Ce point, fréquemment occulté, est pourtant le point de départ et le centre de tout le débat. Eh bien oui, parce que si tous les Etats du continent américain étaient intégrés dans les Etats-Unis d'Amérique, nous ne verrions aucun mal à ce que les ressortissants des États-Unis soient qualifiés d'Américains. Au contraire, ça serait même logique. Le problème, c'est que ça n'est pas le cas. Le nœud du débat, si l'on gratte un peu, se trouve en réalité dans le nom même des États-Unis d'Amérique, et ce nom est lié à leur histoire.


La création du nom « États-Unis d'Amérique » date de l'indépendance des Treize colonies britanniques, en 1776. L'argument des défenseurs du gentilé « Américains » est de dire qu'à l'époque,
« les citoyens des États-Unis étaient les seuls à pouvoir se dire « citoyens américains », la plupart des autres habitants du continent étant encore des sujets britanniques, espagnols et portugais. » Cet emploi consacré par l'usage ne résulterait donc pas à première vue d'une volonté hégémonique. 

J'appelle Davy Crockett à la barre

Ce raisonnement (je vais essayer d'aller dans leur sens, allez...) implique que l'on accepte de mettre de côté les Amérindiens des grandes plaines, qui n'étaient intégrés dans aucun Empire européen et qui étaient, à l'époque, des
« Américains » libres (dans le sens continental du terme).


Alors vous allez me dire que les Amérindiens n'étaient, ni de près ni de loin, des « citoyens », qu'ils n'avaient pas d'organisation de type étatique disposant de lois fondamentales, qu'ils ne pouvaient pas être considérés comme des « citoyens américains » vivant hors des États-Unis. Qu'ils étaient juste des « indigènes » vivant dans leurs tipis avec des référents d'un autre temps. Or (oui, parce que tout n'est pas si simple...), ce présupposé tend à être contredit au moins par le cas de deux Nations amérindiennes : d'abord par l'existence de la Constitution de la Nation iroquoise, attestée dès 1702, et qui a été traduite en français en 1720 (elle est composée de 117 paragraphes et on peut la trouver facilement). Ensuite par le traité du 30 mars 1802 passé entre les chefs Cherokees et le gouvernement US, qui garantissait la souveraineté perpétuelle des Cherokees sur leurs terres, et leur reconnaissait le droit d'instaurer un système gouvernemental, avec un chef principal élu, un sénat et une chambre de représentants. En 1827, John Ross, le président du Comité National Cherokee, rédigeait même une Constitution de type occidental, à laquelle le Chef de la Nation devait prêter serment, faisant accéder les Cherokees au statut de « Nation Civilisée » (dont la capitale était New Echota).


Pourquoi l'ignore-t-on me direz-vous ? Parce que les Cherokees ont été délogés de leurs terres illégalement moins de dix ans plus tard par les colons US, l'Etat de Georgie et l'Etat fédéral, dans des circonstances particulièrement dramatiques (contre l'avis de la cour Suprême des États-Unis). Vous ne me croyez pas ? Allez vérifier. C'est parce qu'il s'opposait à l'Indian Removal Act et à la déportation des Amérindiens vers l'Est que Davy Crockett a perdu son siège au Congrès en 1835.


Alors ça vous allez me dire qu'on s'en fout de tout ça, que ces structures amérindiennes n'étaient pas vraiment des Etats dans le sens occidental du terme, avec des assises internationales, que les Amérindiens ne disposaient d'aucune organisation politique souveraine : qu'ils étaient juste une bande de chasseurs de bisons attardés, des ploucs qui se baladaient torse-nu en criant « hou-hou », inconscients des enjeux internationaux et de leur place sur le continent. Votre « réflexion » tendrait à être contredite par la signature de traités souverains entre l'Etat fédéral Américain et les Nations Indiennes, et par l'existence de puissantes confédérations amérindiennes aux fondements juridiques clairs (la Gayanashagowa) : les Cinq-Nations (Haudenosaunee), puis la ligue des Six-Nations. Elle tendrait aussi à être contredite par les innombrables guerres entre les États-Unis et les Amérindiens.


Là, vous allez me répondre, peut-être, que les Amérindiens n'avait aucune notion de citoyenneté ou de droit, qu'ils n'étaient que des marchands ambulants de peaux de castor, des genres de gitans des grandes plaines obéissant au Grand-Esprit. Cet argument tendrait à être contredit par l'organisation interne complexe des Nations amérindiennes, et notamment des Cinq tribus civilisées, dont les membres étaient soumis à des règles de droit (coutumier) très précises, qui définissaient leur statut civique et fixaient une hiérarchie politique claire. Au début du XIXe siècle, les Amérindiens n'avaient d'ailleurs pas seulement des droits clairement définis. Ils disposaient aussi d'écoles, d'institutions, de journaux, et même, d'agences postales (l'Agence postale de la Nation Cherokee a été fondée en 1817 à Rossville).


Non, en fait, si on est vraiment honnêtes, ce raisonnement implique surtout que les Amérindiens n'avaient pas vocation à intégrer « l'Amérique », ce concept importé d'Occident à leurs dépends, et notamment l'Amérique des États-Unis. Ils n'avaient pas même vocation à continuer à exister tout court. Les Amérindiens ont toujours été traités par les colons des États-Unis comme un obstacle à abattre dans la constitution du territoire « américain » (le sens national rejoignant ici le sens continental). La « question indienne » est affectée au ministère de la guerre des États-Unis de 1776 à 1826, période à laquelle a été voté l'Indian Removal Act, visant à déloger les Amérindiens de leurs terres pour les parquer dans des réserves, en marge de la société « américaine » (voir à ce propos les débats autour de la République Lakota).


Ce raisonnement, visant à défendre la neutralité du gentilé « Américain », sous prétexte que les États-Unis auraient été la seule entité politique indépendante du continent à la fin du XVIIIe siècle, est orienté, repose sur un certain nombre d'inexactitudes historiques, et est de nature hégémonique au regard de l'histoire des Amérindiens.

L'Améri-yes-we-can !

Au-delà de la question indienne (oui, parce qu'après tout, qui se soucie des Amérindiens et de leur histoire ?), si l'on se penche sur la Constitution de 1787 rédigée dans la foulée de la guerre d'Indépendance, et sur l'histoire des États-Unis, on s'aperçoit que les faits sont plus complexes qu'il n'y paraît, et que le gentilé « Américain » est loin d'être neutre.


Durant plus d'un siècle et demi, les États-Unis constituent, d'un point de vue juridique et géopolitique, une marche ouverte ayant vocation à intégrer de nouveaux Etats américains, sans aucune limite géographique, linguistique ou démographique, et donc à s'étendre potentiellement sur tout le continent américain (Constitution des Etats-Unis d'Amérique, article IV, section 3 : « De nouveaux Etats peuvent être admis par le Congrès dans l'Union [...] », encore valable aujourd'hui).


Le gentilé « Américain » n'est pas neutre non plus au regard du processus de formation territoriale des États-Unis, qui est plutôt original dans le cadre du continent américain.
 

Contrairement à ce qui se passe avec le Brésil ou le Mexique, le territoire actuel des États-Unis d'Amérique ne se limite pas à son étendue originelle ou à sa zone d'influence initiale. Il avait, dès le XVIIIe siècle, vocation à s'étendre au-delà, et englobe aujourd'hui plusieurs morceaux d'autres « Amériques » : des bouts d'« Amériques européennes » non-anglophones, de larges régions du Mexique indépendant, les immenses Territoires amérindiens indépendants, des îles du Pacifique, et au moins un Etat souverain américain de type occidental (le Texas, indépendant de 1836 à 1845).


Plus précisément, à l'Amérique anglaise (les Treize colonies ayant proclamé leur indépendance), s'est ajoutée
l'Amérique française (la Louisiane, achetée à la France en 1803), un morceau de l'Amérique espagnole (Floride, Porto Rico, dont le statut est aujourd'hui encore peu clair), une frange immense du Mexique indépendant, qui est littéralement démembré lors de la guerre mexico-américaine (il perd le Nouveau-Mexique, la Californie, et le Texas en 1846), toute l'Amérique russe (l'Alaska est achetée en 1867 pour 7 millions de dollars), les territoires des Amérindiens, spoliés et victimes d'un violent ethnocide aujourd'hui reconnu par l'ensemble des historiens aux États-Unis, et même des îles du Pacifique n'appartenant pas à la plaque continentale américaine (Hawaï, et les d'une certaine façon les Samoas).


La vocation expansionniste, si ce n'est hégémonique, des Etats-Unis en Amérique est donc patente, et d'ailleurs parfaitement assumée par l'historiographie officielle aux États-Unis, avec le phénomène de la marche vers l'Ouest. La fédération ne prend sa forme actuelle que tardivement, en août 1959, avec l'intégration d'Hawaï. Et la Constitution des États-Unis permet, aujourd'hui encore, l'intégration de nouveaux Etats dans la fédération. Le cas de Porto-Rico est d'ailleurs encore en suspens, et celui des Samoas relativement ambigu. Le gentilé « Américain », panaméricain par nature, est aussi porteur de cette charge historique.


À cet aspect juridique et géopolitique, s'ajoute l'idéologie expansionniste et la politique de domination des États-Unis sur le continent américain, clairement énoncée par les dirigeants des États-Unis (et ne me dites pas que je suis antiaméricain, parce que je n'y peux rien, moi, si l'histoire est ce qu'elle est : je fais juste quelques rappels).



Cette idéologie et cette politique s'ébauchent avec l'aide aux Insurgés indépendantistes des Caraïbes et de l'Amérique espagnole au début du XIXe siècle. Le but, à l'époque était de bouter les Etats européens hors du continent.


La doctrine Monroe de 1823, résumée dans la formule célèbre « l'Amérique aux Américains », donne un droit de regard et d'intervention aux États-Unis sur les affaires du reste du continent américain. Toute l'ambiguïté du gentilé officiel des États-Unis est d'ailleurs dans sa jolie formule : « l'Amérique aux Américains » : quelle Amérique ? Pour quels Américains ? Au nom de qui parle-t-il ? Parce que tel que notre godelureau et ses successeurs l'ont interprétée, ça a été : « le continent américain aux Etats-Uniens ».


L'idéologie de la Manifest Destiny, formulée par John O'Sullivan en 1845, expose clairement le projet expansionniste et hégémonique des États-Unis : « C'est notre destinée manifeste de nous déployer sur le continent confié par la Providence pour le libre développement de notre grandissante multitude. ». Cette idéologie constitue le fil directeur idéologique de l'expansion des États-Unis vers l'Ouest.


Elle se prolonge dans la politique de domination économique de l'Amérique centrale (avec la mise sous tutelle d'une grande partie de l'Amérique centrale, notamment avec l'United Fruit Company), dans la politique d'ouverture forcée des ports japonais (l'expédition du commodore Perry au Japon en 1853), dans la politique du Big Stick définie par Théodore Roosevelt en 1901, et plus largement dans toutes les interventions des États-Unis en Amérique latine au XXe siècle (à Cuba jusqu'en 1961, au Chili en 1973, en Amérique centrale).


 Affirmer la neutralité du gentilé « Américain », pour l'opposer au gentilé « Etats-Unien », qui serait plus orienté politiquement, ou militant, semble être, au regard des arguments développées, un parti-pris, et une erreur.

« États-Uniens », a word on the move : l'usage...

Maintenant voyons l'usage. Remontons un peu dans le temps. Revenons aux origines. Il vient d'où, ce mot si problématique, dans sa version française ? Si l'on en croit un article de Jacques Desrosiers, publié par le Bureau de Traduction du Canada, l'occurrence la plus ancienne du terme « États-Unien » figurerait « dans un article paru en 1942 dans la French Review, « La Vie Intellectuelle au Canada Français », sous la plume de Marine Leland » : « Le roman canadien-français ne peut se comparer, ni du point de vue de la qualité ni de celui de la quantité, à la poésie ou à l'histoire canadienne. Il ne peut se comparer non plus au roman états-unien. »

C'est la version la plus communément admise (et citée). Mais en fait, il semble que le mot soit même apparu une dizaine d'années plus tôt, en 1934. On le retrouve fréquemment dans une soixantaine d'articles de la revue québécoise L'Action nationale entre 1934 et 1945 (consultable à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec).


Ce vilain mot serait donc né au Québec... Ah oui... Ça  aussi, c'est une bonne raison de ne pas l'aimer ! C'est un produit d'importation : un émigré clandestin. Ça vient de chez les sauvages. C'est un mot qui n'a pas de papiers français au départ ! Et c'est quand même rentré chez nous.


Non, toute blague à part... En fait c'est assez logique que ça vienne de chez les Québécois : ils sont là, le pif collé aux États-Unis, qui s'arrogent le monopole de l'américanité citoyenne, ou de la citoyenneté continentale. Je comprends que ça ait pu les agacer à un moment. Moi-même ça m'agacerait sans doute un peu si les Allemands se faisaient appeler « les Européens ».


Il semble, si j'en crois le même article, que le mot ait été assez en vogue outre-atlantique dans les années 1940-1950. À quel point ? Je serais bien incapable de le dire (demandez à Desrosiers, il saura peut-être). Suffisamment en tous cas pour que les mecs de chez Robert en prennent acte. L’existence officielle du terme en langue française est attestée par Le Petit Robert depuis 1965. Mille neuf-cent soixante-cinq hein ? Il n'est donc pas à proprement parler « né de la dernière pluie » ce petit là... Il est même assez âgé : il faudrait voir à commencer à lui montrer du respect peut-être, hein ?


Et alors comment il est arrivé jusqu'à nous ? Eh bien comme une star... Par les médias ! Il est diffusé par ce biais depuis les années 1990, et il s'est progressivement installé en France dans les années 2000.


Aujourd'hui il fait sa petite vie de challenger à l'ombre du gros « Américain » obèse, à la façon de Steve Jobs jadis dans l'ombre de Bill Gates. Il convertit doucement, surtout dans les hautes sphères, comme les Jésuites en Chine au XVIIIe siècle.


Où donc ? Eh bien il est utilisé par exemple par certains traducteurs de Courrier international. Le Centre d'analyse stratégique, organisme de prospective et de réflexion du gouvernement français (rattaché au Premier ministre) y recourt fréquemment dans ses notes de veille. Il s'est même invité dans les universités françaises ! Il est discuté et employé à l'université Paris ***, dans le cadre des séances consacrées à l'histoire de l'Amérique latine et des États-Unis, en première année d'histoire (je donne les références à la demande), sans que le terme « Américain » soit lui-même censuré, sanctionné ou proscrit. Les deux termes cohabitent, comme de bons amis, et font l'objet d'une réflexion. 


La charge historique et la légitimité du gentilé « Américain » étaient étudiée et discutées dans la même université par le professeur J. Piel dans ses cours d'histoire de l'Amérique latine (j'y avais assisté, j'avais trouvé ça très intéressant, c'est lui qui avait attiré mon attention sur le discours de Monroe). Il arrive que le terme « États-uniens » soit employé dans de grands quotidiens français, tels que Le Monde ou Libération. On le retrouve aussi dans certains textes publiés par Le Monde diplomatique. L'Agence France-Presse et Reuters l'utilisent à l'occasion dans leurs dépêches. L'écrivain et journaliste Philippe Meyer, dont la maîtrise de la langue française ne saurait être que difficilement contestée, l'emploie également pour des questions de rigueur et de précision. L'émission "Rendez-vous avec X" de Patrick Pesnot, ayant lieu tous les samedis sur France-Inter, a aussi choisi de l’employer exclusivement. Les grands dictionnaires de la langue française, Larousse ou Robert, ne lui prêtent aucune charge militante par définition. Et la règle, dans nombre de publications actuelles, semble être de laisser cohabiter les deux mots.


Alors oui, le terme est encore nettement moins répandu en France que dans les autres pays latins (il est d'usage presque systématique en Amérique latine). Et il prête à débat. Ses détracteurs signalent qu'il est « fréquemment utilisé avec une connotation idéologique dans le cadre de discours critiquant l'action des États-Unis, comme ceux de Marine Le Pen, et dans des organismes et médias antiaméricains ou altermondialistes comme Indymédia ou Rezo.net. », ou pire, « les publications du Réseau Voltaire » (oh là là...). Ça les agace beaucoup. J'ai pu le vérifier moi-même.


Ils ajoutent que : « L'utilisation de ce terme dans différents éditoriaux de journaux francophones provoque de nombreuses réactions de lecteurs. Un article de la version en ligne du Monde contenant « états-unien » a provoqué de nombreuses réactions de lecteurs percevant ce terme comme péjoratif ou négatif à l'égard des États-Unis. Cette réaction des lecteurs a été reprise par le New York Times quelques jours après et par l'International Herald Tribune. » Alors oui, ok. Mais bizarrement, ils oublient de préciser que sur leur blog, les correcteurs du monde avaient conclu (de façon assez sage et posée je trouve) : « Pour notre part, en tant que correcteurs du site Internet du Monde, vestales de la langue française et responsables de sa bonne tenue orthographique et sémantique, nous sommes tenus d’avoir une opinion, qui est la suivante : Américain a pour lui la légitimité historique, Etats-Unien, son "challenger", est assez pertinent et comble en partie un manque lexical ; en fait, ils se complètent et nous laisserons donc les deux cohabiter... même si nous titille la tentation d'une pratique nouvelle. »


D'autres médias ont des réactions plus conservatrices, au regard des troubles à l'ordre public que ça engendre (risque de révolution communiste oblige, les contre-révolutionnaires sortent dans la rue). France Info a par exemple précisé, à la suite d'une question d'auditeur, que l'usage du terme n'aurait pas cours dans ses reportages et bulletins, sans doute pour ménager les auditeurs trop sensiblement défenseurs de l'ordre sémantique établi (ils vont croire que je suis un Anarchiste...).


Non, mais sérieusement : quand on voit la liste des usagers du mot, cités un peu plus haut, comment peut-on encore affirmer que le mot « Etats-Uniens » est un strict monopole des extrémistes ? Ou alors les collaborateurs du Premier ministre sont des membres infiltrés d'ATTAC. Et Fillon nous la refait à la Jospin : ex-Trostkiste en costard arrivé au pouvoir « par effraction » pour ressusciter l'URSS (eh oui, je connais bien mes classiques de droite !).


Quant à sa charge antiaméricaine pour ainsi dire congénitale, faut arrêter de déconner : c'est comme les mots « chienne », « chatte » ou « minou » qui peuvent avoir une connotation tout à fait particulière dans certains contextes et en certaines compagnies (parfois tendres, détrompez-vous !). C'est pas pour ça que je vais arrêter de dire qu'un chien femelle est une chienne et qu'un chat femelle est une chatte, et que je vais arrêter d'appeler mon chat « Minou ! ». Je trouverais ça tout aussi bizarre et stupide si on censurait ces mots sur Wikipédia.


En fait, le vrai paradoxe, c'est qu'en bloquant la diffusion et l'emploi du mot « Etats-Uniens » sous prétexte de faible usage, ils empêchent le mot de se répandre et de prendre la dimension qu'ils exigent. C'est insoluble ! Ils empêchent juste bêtement le langage de suivre son libre cours, sans tenir compte du contexte d'utilisation, de la charge réelle des mots : ils étouffent le langage et la pensée, et imposent, dans un acte militant, l'emploi courant d'un terme, qui est au moins aussi peu neutre que celui qu'ils dénoncent. Parce qu'en réalité, rien n'est neutre.


L'usage finira sans doute par trancher, hors de Wikipédia (c'est-à-dire hors de leur sphère d'influence). Le langage appartient à tous. Un mot ne meurt que de lui-même. On ne combat pas les mots. J'aurais même tendance à dire que plus on tape dessus, plus ils se renforcent lorsqu'ils sont légitimes. Leur sens s'éclaire, et leur élan s'accroît par effet de contre-résistance. Aux censeurs de tout poil, aux traqueurs de mots, j'offre la phrase de Malherbe à Henri IV en guise de conclusion : « Quelque absolu que vous soyez, vous ne sauriez, Sire, ni abolir ni établir un mot, si l’usage ne l’autorise. »


Donc je poste tout ça (dans des termes beaucoup plus académiques, hein, ça va de soi). Le lendemain, je vois que l'article complété a été supprimé, remplacé par l'ancien. Aucune remarque, aucune critique. Un laconique : (rv POV et TI par IP) qui signifie : « Neutralité de point de vue » et « Travail Inédit », à côté du nom de l'administrateur ayant viré mon article (très anti-« Etats-Uniens » lui aussi si j'en crois sa page de discussion, bien que pour d'autres raisons que l'ami J.-J. G.). Je me suis dit que ma thèse était aussi inédite et que mon point de vue était aussi neutre que ceux figurant dans l'article, que leur présence rééquilibrait juste la chose. Puis j'ai compris qu'ils ne voulaient pas rééquilibrer la chose. Et j'ai décidé de laisser béton, et de venir publier tout ça de façon plus fun sur mon blog.

Post Rectum

Avant de rédiger cet article, j'avais eu un échange en messagerie privée avec l'ami Jean-Jacques Truc (on va l'appeler comme ça, pour sauvegarder son anonymat), qui s'amusait (et s'amuse probablement encore) à traquer les « Etats-Uniens » dans les textes publiés (il n'aime vraiment pas ça, ça doit le rendre tout fou).

Je ne peux pas m'empêcher de le reproduire ici. L'ami Truc commence, après avoir modifié mon article pour en retirer mon « Etats-Uniens » :

« Bonjour, suite à votre modification sur Diaspora portugaise, je vous indique cette prise de décision. cordialement, Jean-Jacques Truc 11 janvier 2012 à 08:54 (CET). »

Un peu surpris, je lui réponds :

« Bonjour,

Elle est un peu longue à lire, mais j'en saisis l'essence. Je suis enseignant-chercheur en histoire spécialiste en histoire moderne, je travaille entre autres sur l'histoire des Etats-Unis, et cette prise de position sémantique de Wikipédia qui impose un usage étymologiquement discutable en France me semble un peu arbitraire et dénuée de sens. Ce n'est pas une question politique mais une question linguistique et d'histoire.

Une langue n'est pas immuable, elle évolue avec la pratique, que chacun forge. Vouloir fixer dans le marbre l'emploi d'Américain pour désigner les citoyens des Etats-Unis est un non-sens de mon point de vue, ça paralyse la langue, et c'est incohérent d'un point de vue historique. Cet usage avait du sens à la limite au XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle, mais aujourd'hui non. Il est par ailleurs très mal perçu dans certains pays outre-atlantique : il manque finesse et fait un amalgame grossier.

Les mentalités peuvent évoluer, l'usage aussi. Nombre de mes collègues emploient, comme moi, le terme " Etats-uniens " sans connotation péjorative. Ils attirent eux aussi l'attention de leurs étudiants sur ce problème, sur cet usage discutable.

Dans l'article, le mot apparaît au milieu d'une liste de gentilés américains, il n'est en rien dévalorisant ou péjoratif : ça n'aurait d'ailleurs aucun sens dans le cadre de mon texte, vous en conviendrez. Laisser le terme Etats-uniens devenir un monopole des antiaméricains forcenés est un peu triste je trouve. Mais la décision est prise je pense, et la règle s'impose à moi à partir du moment où je publie sur Wikipédia, n'est-ce pas ? Mon texte est déjà sous licence Creative Commons, je ne peux plus le retirer. Il n'y a donc plus rien à faire. Mais je trouve cela un peu dommage. Cordialement, [Moi] 11 janvier 2012 à 23:41‎ (CET) »

Ça ne lui a manifestement pas plu (je n'étais pas encore allé voir sa page de présentation) :

« Vouloir attirer "l'attention de leurs étudiants sur ce problème, sur cet usage erroné" indique une intention militante qui me semble assez peu compatible avec une conception valide de la pédagogie. Qualifier par ailleurs un usage officiel et séculaire d'"amalgame grossier" dénote en outre une connaissance assez médiocre des usages et des contextes historiques, surtout de la part d'enseignants. Que le langage évolue, fort bien, mais wikipédia n'a pas à devenir un outil gratuit au service d'un quelconque militantisme, surtout quand il s'agit d'imposer la diffusion d'un néologisme peu usité, politiquement connoté et franchement laid. Je doute par ailleurs que le mot s'impose réellement en langue française, à court, moyen ou long terme. cordialement,  Jean-Jacques Truc 12 janvier 2012 à 08:41 (CET) »

Je me suis dit : « Tiens, un cul-serré ? » Je suis allé lire sa page de présentation. J'ai compris. Mais j'ai quand même pris la peine de répondre (je sais pas pourquoi, ne me demandez pas) :

« Je vous trouve bien agressif, et vos propos sont en grande partie inexacts et souvent maladroits (quand ils ne sont pas déplacés). Il semble qu'il y ait là quelque chose d'affectif et de militant. Ma réponse dans le texte :

Vouloir attirer "l'attention de leurs étudiants sur ce problème, sur cet usage erroné" indique une intention militante qui me semble assez peu compatible avec une conception valide de la pédagogie.

Vous ne comprenez manifestement pas en quoi consistent la recherche scientifique et l'enseignement universitaire. Le rôle d'un enseignant-chercheur universitaire en histoire est notamment d'attirer l'attention de ses étudiants, de ses collègues et plus largement de la communauté scientifique sur les problèmes liés à l'usage des mots, ou des expressions inadéquates, sur la base d'une analyse critique des faits et des sources historiques. Le changement d'usage commence bien évidemment, s'il le souhaite, dans ses propres travaux. Un grand nombre de débats actuels, dans le milieu scientifique, tournent autour de l'usage des mots et des expressions : savoir si le massacre des arméniens est ou pas un " génocide ", savoir si la guerre d'Algérie est ou pas une " guerre " du point de vue français, savoir si l'expansion portugaise en Orient relève ou pas d'une expansion impériale, comprendre la sémantique liée à la colonisation : la différence, concernant les Algériens, entre " sujet " et " citoyen ", comprendre le sens exact des mots " esclavage ", " déportation ", savoir si tel groupe forme une " nation ", savoir ce qu'est une " République ", etc. L'étymologie est la branche d'une science appelée la linguistique que vous semblez ignorer. Les mots sont quelque chose de tout à fait fondamental, et leur usage, contrairement à ce que vous semblez croire, est critiquable. Une part du travail de l'historien consiste en cela : analyser et critiquer l'usage des mots. Les mots ont un sens et une charge historique, et ils évoluent, notamment grâce à la science, puis à l'usage. Sans cette évolution les Noirs américains et européens seraient encore appelés des " Nègres ". Vous avez une conception du travail scientifique tout à fait surprenante, qui montre que vous n'en êtes pas un.

Qualifier par ailleurs un usage officiel et séculaire d'"amalgame grossier" dénote en outre une connaissance assez médiocre des usages et des contextes historiques, surtout de la part d'enseignants.

Mais enfin... Le fait qu'un usage soit séculaire ou officiel n'est en rien un argument. La vérité n'est pas un mensonge qui aurait servi longtemps. Des usages séculaires ou officiels pour le moins discutables, dans les pratiques ou le langage, ont heureusement été modifiés, notamment grâce à la science : nous avons revu les qualificatifs pour les homosexuels, les musulmans, les Noirs, les malades psychiatriques, qualifiées jadis, dans le désordre, d' " Infidèles ", de " Nègres ", " d'esclaves ", de " fous ", " d'aliénés ". Les scientifiques US outre-atlantique ont eux-même revu des qualificatifs : les Indiens sont devenus des Amérindiens, les Noirs sont devenus des Afro-Américains. Les qualificatifs changent quotidiennement, parce que le langage évolue et progresse, en général pour devenir plus fin, plus précis : nain, aveugle, etc., tendent à disparaître du langage en France. La faute à ? Aux " militants altermondialistes " ? Allons... N'est-ce pas un peu simpliste et réducteur ? L'évolution du langage n'est-elle pas un peu plus complexe que cela ? Ne vous apercevez-vous pas que le langage évolue d'une génération à l'autre, et que la science y prend une grande part ? Je choisis, en tant qu'historien, de qualifier les citoyens des États-Unis de " citoyens des États-Unis ", " d’États-uniens " ou de " citoyens US " comme je choisis de qualifier les citoyens de l'Union européenne de " citoyens de l'Union européenne ", de " citoyens de l'Union ", ou de " citoyens de l'UE ", et pas " d'Européens ". C'est une question de rigueur linguistique, et en aucun cas un acte militant (ou alors je milite pour plus de rigueur linguistique). À la limite, on peut qualifier les habitants de l'Union indienne d'Indiens parce cet État englobe l'ensemble des régions à majorité hindouiste du sous-continent indien.

Qualifier tous les restaurants asiatiques de restaurants chinois est un amalgame fréquent et bien enraciné en France. Il n'en reste pas moins grossier et insultant. Il est des pratiques et des usages erronés et militants bien installés dans les mœurs. Il n'est pas illégitime de les signaler, et de considérer qu'ils doivent être changés, pour des questions de rigueur et de bon sens.

Que le langage évolue, fort bien, mais wikipédia n'a pas à devenir un outil gratuit au service d'un quelconque militantisme, surtout quand il s'agit d'imposer la diffusion d'un néologisme peu usité, politiquement connoté et franchement laid.

Je suis, personnellement, d'accord avec vous concernant la " laideur " de ce mot . Je n'en suis pas le créateur. Je le trouve quelque peu tarabiscoté. Mais la beauté est une notion toute subjective et très peu scientifique. J'espère personnellement qu'un autre gentilé plus doux à mes oreilles fera son apparition (peut-être avez-vous des suggestions ?). Mes étudiants me font parfois la remarque, et je ne défends l'usage du gentilé " États-uniens " que dans des " termes mesurés ". Je dis moi-même le plus souvent " citoyens des États-Unis " ou " citoyens US ", et ne sanctionne ni ne censure jamais l'usage du terme " Américain " (sauf dans des copies qui traitent des rapports entre les États-Unis et d'autres Etats du continent américain, pour des raisons de clarté évidentes, par exemple dans le contexte du panaméricanisme bolivarien). En revanche, le terme " États-uniens " n'est plus un néologisme dans le sens où vous semblez l'entendre, c'est-à-dire une faute de français (il figure d'ailleurs dans les correcteurs d'orthographe et les dictionnaires). Et s'il est encore " peu usité " en France, il tend à l'être chaque fois d'avantage, pour des questions de rigueur et de précision, notamment dans le milieu scientifique (historiens spécialistes de l'Amérique latine, par la force des choses). Vous l'entendez même de plus en plus dans les médias, par exemple dans une émission sur France-Inter, tous les samedis ("Rendez-vous avec X"), qui l’emploie exclusivement, ou dans de grands journaux (Le Monde par exemple), pour des raisons de précision scientifique. Un grand nombre de personnes (le plus souvent politiquement pro-américaines) se mettent en colère en l'entendant ou en le lisant parce qu'ils y voient une " charge anti-américaine, considérant ce terme comme une sorte de machine de guerre " altermondialiste " (ce courant politique étant friand du mot). " Je vous informe donc que les altermondialistes n'ont pas le monopole de ce mot (je n'en suis pas un). Et qu'il tend à entrer dans l'usage. La règle, dans nombre de publications actuelles, est de plus en plus de laisser cohabiter les deux mots. Je pensais que Wikipédia l'adopterait naturellement.

Je doute par ailleurs que le mot s'impose réellement en langue française, à court, moyen ou long terme.

Je ne me hasarde pas à donner des pronostics quand à l'usage des mots, ça n'est pas scientifique. Je vous laisse à vos combats. Vous avez manifestement une position très crispée sur ce sujet que vous avez décidé d'imposer. Il semble que vous en ayez fait une sorte d'affaire personnelle. Tout cela n'est pas très sérieux. Quant à parler de pédagogie, d'enseignement ou de contexte historique, vous parlez de choses que vous ne comprenez manifestement pas. Il est inutile de continuer à discuter, ce serait une perte de temps. En ce qui me concerne, la conversation s'arrête ici. 12 janvier 2012 à 22:19 (CET) »

Je savais qu'il répondrait. Ce genre de mec a besoin d'avoir le dernier mot :

 « Si vous souhaitez faire ce genre de choix militants dans votre vie professionnelle, cela vous regarde. Le "grand nombre de personnes" qui y voit, dans la plupart des cas, une "charge anti-américaine", a parfaitement raison et son emploi dans les médias est heureusement rare. Sa soi-disant progression dans le langage courant me semble relever du fantasme et le seul usage officiel reconnu en France est par ailleurs, pour l'instant, "Américain". "Rendez-vous avec X" me semble être la seule émission grand public ayant fait le choix malheureux de l'utiliser dans ses textes, du fait d'un parti-pris militant (pas forcément "altermondialiste", d'ailleurs) de son créateur. "Quant à parler de pédagogie, d'enseignement ou de contexte historique, vous parlez de choses que vous ne comprenez manifestement pas." : si, quand je vois des usages discutables dans l'enseignement, je pense être parfaitement capable de m'en rendre compte. La pédagogie ne consiste pas à déformer le vocabulaire de ses élèves pour le conformer à ses propres idées. La seule "affaire personnelle" était pour moi de contribuer à l'éradication de wikipédia de ce néologisme trop politiquement marqué. C'est chose faite et je ne vois pas de raison de revenir là-dessus. Je tiens néanmoins à préciser qu'il n'y a aucune agressivité personnelle dans ma réponse, mais un simple agacement de voir revenir la question de cet usage marginal. Jean-Jacques Truc 13 janvier 2012 à 09:05 (CET) »

Enfin voilà. J'ai laissé les choses en l'état. Donc une de mes résolutions pour l'année 2012 sera de cesser de contribuer sur Wikipédia, pour ne pas me retrouver confronté à ça. Ça me fera plus de temps pour voir le monde et jouir de la vie.

N.B. : Les Amérindiens appellent l'Amérique Abya Yala, expression kuna que l'on traduit « Île de la Tortue », ou « terre dans sa pleine maturité » (j'ignore laquelle de ces deux traductions est la bonne). J'ai trouvé ça intéressant. J'ai eu envie de le faire savoir. Ce nom a été adopté officiellement en 1992 par les Nations Indigènes d'Amérique pour désigner l'ensemble du continent en lieu et place du terme vespuccien « Amérique », auquel ils ont visiblement du mal à adhérer.

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